A l’occasion de notre colloque du 3 mars dernier, un regard extérieur a été porté sur le sens de la peine ainsi que sur la façon dont elle prend place dans la société actuelle. Car la Justice évolue parallèlement à la société, et la pénalité n’y fait pas exception.

Lors de cette journée, de nombreuses questions ont été abordées par les intervenants invités par le SPF Justice.

Au centre de la pénalité, qu’est-ce qui prend le plus d’importance ? Le citoyen ? Son environnement ? L’infraction commise ? Dans bien des cas, la réaction de la justice n’est pas proportionnelle aux faits commis et, malgré les recommandations de nombreux spécialistes, la prison, aujourd’hui encore, est trop souvent considérée comme unique solution. Pourtant, de multiples infractions peuvent faire l’objet de peines, sanctions ou mesures alternatives, souvent plus adaptées à la nature de l’infraction, ou à l’auteur lui-même. D’autant que, comme certains orateurs l’ont évoqué, il est désormais avéré que la prison n’est que peu efficace pour lutter contre la criminalité. Si on veut, dès lors, encourager un recours plus large aux peines dites modérées, comme la peine de travail, la surveillance électronique ou la probation, ce choix politique doit s’accompagner d’un dialogue avec la société civile.  Les arguments existant en faveur de ces peines doivent être explicitement présentés. Mais le dialogue doit aussi tenir compte des émotions et des sentiments que suscitent la criminalité et la pénalité, et, pour cela, s’appuyer sur des valeurs partagées au sein de la société. La modération pénale n’en sera que plus légitime.

Pourquoi punir et comment ?

Quel sens notre justice entend-elle attribuer aux peines qu’elle prononce ? Punir, mais encore ? Rééduquer afin de favoriser la réinsertion de l’auteur mis en cause ? Sanctionner, réparer, réduire les risques ? C’est peu dire que la loi ne se prononce pas toujours clairement sur les objectifs qu’elle souhaite poursuivre. Les imprécisions et les confusions que ce défaut de clarté entraîne ne sont pas sans conséquence pour les justiciables et le respect de leurs droits, ainsi que cela nous a été montré en particulier dans le domaine du droit de la jeunesse.

Comment punir ? Les exposés de l’après-midi ont mis en évidence que le système pénal et les autres institutions de contrôle dont nous disposons réagissent de manière très différenciée vis-à-vis des auteurs de comportements que la société estime blâmables.

Et maintenant, on fait quoi ?

Quant à l’avenir, les spécialistes présents ce 3 mars s’accordent pour affirmer que si, dans certains domaines, on peut se passer du pénal, si certains pays d’Europe ont réussi à faire diminuer de manière drastique leur population carcérale, on devrait pouvoir, chez nous aussi, penser autrement la pénalité. On pourrait dépénaliser certains comportements, pour aller vers des formules de régularisation et de dédommagement civil, comme celles dont on use déjà dans certains domaines tels que la criminalité dite « en col blanc ». On pourrait, ensuite, envisager un recours plus fréquent encore qu’actuellement à des peines moins intrusives et moins coûteuses que la prison. On pourrait, enfin, pour les comportements considérés comme les plus graves, là où la prison semble incontournable, en faire un usage repensé pour tenter de limiter ses effets dommageables et les risques que cela emporte pour la société.

Mais ce que la journée a surtout mis en lumière c’est la multiplicité et le caractère fondamental des questions qui ont été exposées, et la nécessité de poursuivre sans relâche une réflexion en profondeur. Certains des intervenants nous ont proposé des voies pour nous atteler à cette tâche en gardant ouvert le champ des possibles : envisager différents cas de figure, élaborer des scénarios, en associant à ce travail les partenaires du monde judiciaire ou même les citoyens qui entrent en contact avec la justice.

Cette invitation à la réflexion et à la créativité s’adresse finalement à toutes celles et tous ceux qui œuvrent chaque jour à rendre la Justice de ce pays meilleure et plus efficace, mais aussi plus humaine, et qui peuvent apporter leur contribution à l’élaboration de notre vision commune de ce que devrait être la Justice en 2020. Alors, tous ensemble, réinventons-la et allons de l’avant !